Cette série de 6 tomes évoluant dans un monde d'Héroic-Fantasy décrit fidèlement le moyen-âge tel que l'on peut se le représenter mais en y ajoutant une kyrielle de détails issus de scènes de la vie courante et qu'il est rare de retrouver dans ce genre de roman. D'habitude, les auteurs préfèrent décrire des instants valorisant les personnages par des stéréotypes et des clichés sur la bravoure, la force morale ou l'héroïsme par le fil de l'histoire. Ici, Lynn Flewelling alterne les descriptions des endroits, des personnages ou encore leurs impressions face à des situations qui leur posent des dilemnes au travers d'une histoire ambigüe et complexe.
Etant un amoureux des blasons et des arts héraldiques, deux passages notés dans ces livres ont particulièrement attiré mon attention. Ils décrivent les armoiries des deux personnages principaux dans un langage qui n'est pas au plus juste de l'héraldique mais qui permet d'imaginer facilement leurs armes sans être un virtuose du blasonnement. Je me suis donc mis en tête de blasonner leurs écus mais à mesure que je relisais ces extraits, j'ai dû avouer mon incompétence à reproduire fidèlement ses explications. Et c'est avec un certain enthousiasme que j'ai repris mon initiation interrompue jadis des arts héraldiques. En me promenant sur la toile, j'ai découvert plusieurs sites qui expliquaient simplement l'art de blasonner. Plusieurs expliquaient le comment, le pourquoi mais je n'en ai trouvé qu'un seul qui permettait d'en discuter, d'échanger des informations de toutes natures, de donner des explications concises mais aussi soumises à interprétation. Je me suis donc inscrit sur ce site que je vous recommande, "Le Temps des Hérauts" (suivez le lien !) où une excellente ambiance règne et dans lequel plusieurs passionnés sont intervenus dans ma demande insolite de blasonner deux extraits de livre où l'auteure (ou bien la traduction française !) ne s'est pas attaché aux détails héraldiques.
Lorsque l'on "blasonne", on représente graphiquement les descriptions des armes d'une personne, d'une famille, d'une ville, d'un religieux, d'une corporation, etc ... Mais, il est possible également de décrire un blason déjà représenté. Dans tous les cas, l'interprétation que l'on peut faire soit de la description, soit des armes représentées, reste subjective au-delà des règles héraldiques établies puisque cet art a évolué aux cours des siècles depuis le moyen-âge.
Ainsi, je vous présente les deux extraits issus des livres décrivant les blasons des deux personnages principaux, suivis de la description graphique et transcrite de leur blason.
Je remercie les administrateur de ce merveilleux site "Le Temps des Hérauts" (suivez le lien !) prolongeant ainsi le temps des héros de notre Histoire et de nos histoires.
Je remercie tout particulièrement Dominique Biendiné qui a eut l'extrême sympathie de palier à mes lacunes en représentant ces deux blasons avec le logiciel Inkscape sous license reprise ci-dessous.
© Dominique Biendiné (CC BY-SA 3.0)
http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/deed.fr
1ier extrait :
Le roi offre à son neveu orphelin et cadet dans l'école royale, un cadeau somptueux puisqu'il s'agit de ses armoiries.
"... Levez-vous, prince Tobin, et recevez de ma main vos nouvelles armoiries : la puissance d'Atyion conjuguée à la gloire de Skala.
Tandis que Nikidès déroulait la bannière, le roi défit le ballot puis déploya un surcot de soie matelassé. Tous deux étaient frappés aux armes du gamin.
Son écu était divisé par un pal rouge vertical qui, associé au timbre au dragon d'argent qui en couronnait le chef, proclamait son ascendance royale. A senestre figurait, en blanc sur champ noir liseré d'argent, le rouvre d'Atyion. A dextre, la flamme dorée de Sakor surmontait le dragon rouge d'Illior sur champ d'azur liseré de blanc - les couleurs de Mère."
"Le royaume de Tobin" vol. 3, "L'éveil du sang", p288, Lynn Flewelling
J'avais décrit ce blason ainsi :
Parti au pal de gueule : au premier d'azur bordé d'argent, à la flamme d'or de Sakor soutenu d'un dragon de gueule d'Illior, qui est d'Ariani, au second de sable bordé d'argent au rouvre d'argent qui est d'Atyion. Son timbre est un dragon d'argent.
Après correction, les armoiries se blasonnent ainsi :
Tiercé en pal : au 1, de sable, au chêne englandé arraché qui est d'Atyion, à la filière, le tout d'argent, au 2, de gueules, au 3, d'azur, au dragon de gueules d'Illior qui est d'Ariani, accompagné en chef d'une flamme d'or de Sakor, à la filière d'argent. Son timbre est un dragon d'argent.
2ième extrait :
L'auteure explique l'écu d'un chevalier adoubé devenant Lord aux bons vouloirs de sa reine.
"Lord Kirothius de La Chesnaie-Mont et de Reine Merci"
"L'écu était divisé en diagonale, de senestre à dextre, par la barre blanche symbolisant la naissance légitime. Au centre de celle-ci figurait une peau de lion qui, drapée sur un bâton, commémorait la première fois où Ki avait risqué ses jours pour défendre Tobin. Tamir le vit sourire à ce rappel de leur lointaine enfance. Le champ de gauche était vert, avec un arbre blanc pour La Chesnaie-Mont. Celui de droite était noir, avec une tour blanche, pour Reine Merci. Enfin, surmontant l'ensemble du motif, une flamme d'argent recueillie au creux d'un croissant de lune rendait un double hommage aux dieux réconciliés."
"Le royaume de Tobin" vol. 6, "La reine de l'oracle", p17, Lynn Flewelling
J'avais décrit ce blason ainsi :
L'écu est taillé : au 1) de sinople à chêne arraché d'argent, au 2) de sable à tour d'argent ouverte, ajourée et maçonnée du champ; à la barre d'argent chargée d'un bâton au naturel drapé par une peau de lion de même. Le timbre est une flamme d'argent qui est de Sakor au creux d'un croissant de même qui est d'Illior.
Après correction, les armoiries se blasonnent ainsi :
Tranché : au 1, de sable, à la tour d'argent ouverte, ajourée et maçonnée du champ, au 2, de sinople, au chêne englandé arraché d'argent, à la bande d'argent, chargée d'un bâton au naturel drapé par une peau de lion de même, brochant sur le tout. Le timbre est une flamme d'argent qui est de Sakor au creux d'un croissant de même qui est d'Illior.
Il m'a semblé nécessaire de préciser quelques détails pour les profanes aussi pour les arts héraldiques que pour son vocabulaire.
Minuscule précis non-exhaustif des arts héraldiques :
Représentation :
L'écu est divisé en 9 parties égales. Chaque partie se nomme un canton.
Le haut de l'écu s'appelle le chef par opposition à la pointe qui se trouve en bas.
Le côté gauche se nomme senestre et le droit, dextre. Ils sont inversés lorsque l'on regarde l'écu. En effet, le blasonnement exprime toujours la vie ou l'histoire de son porteur et donc à ce titre, c'est toujours par rapport à celui-ci que le blason est décrit, ce qui explique l'inversement des côtés.
Emaux :
Les émaux se divisent en trois catégories : les métaux, les couleurs et les fourrures.
Les métaux sont l'argent et l'or.
Les couleurs de base sont le sable (noir), le sinople (vert), le gueule (rouge) et l'azur (bleu). Le pourpre et l'orangé sont arrivés plus tard ainsi que le naturel et la carnation.
Les fourrures sont l'hermine et le vair. Lorsque la couleur du motif est inversée avec celle du champ, on parle alors de contre-hermine ou de contre-vair.
Vocabulaire :
Ajourée : Dans les arts héraldiques, une construction ou un bâtiment est ajourée lorsqu'il est pourvu de fenêtres.
Argent : Dans les arts héraldiques, l'argent est un métal correspondant au blanc.
Armes, armoiries : Au moyen-âge, représentation graphique sur un écu, une bannière, un vêtement, un parchemin ou une peinture décrivant les origines, l'histoire d'une personne, d'une ville ou d'une corporation.
Arraché : Dans les arts héraldiques, "arraché" décrit un arbre avec ses racines ou une tête sanglante.
Azur : Dans les arts héraldiques, l'azur est une couleur correspondant au bleu.
Bande : Dans les arts héraldiques, bande dont la largeur correspond à 2/5 de la largeur du blason et positionnée dans la diagonale de celui-ci, du canton dextre du chef jusqu'au canton senestre de la pointe.
Barre : Dans les arts héraldiques, bande dont la largeur correspond à 2/5 de la largeur du blason et positionnée dans la diagonale de celui-ci, du canton senestre du chef jusqu'au canton dextre de la pointe.
Blason : voir écu, armes et armoiries.
Champ : Champ correspond au fond de l'écu ou de ses parties.
Chef : Chef correspond au haut de l'écu, par opposition à la pointe, en bas de l'écu.
Dextre : Côté droit de l'écu pour son porteur.
Ecu : Bouclier au moyen-âge.
Englandé : Dans les arts héraldiques, "englandé" décrit un chêne représenté avec ses glands. On parle aussi de " chêne fruité".
Filière : Liseré au bord de l'écu.
Gueules : Dans les arts héraldiques, le gueules est une couleur correspondant au rouge.
Maçonné : Dans les arts héraldiques, une construction ou un bâtiment est maçonné lorsque les briques, les pierres ou les moellons apparaissent dans sa représentation graphique.
Naturel : Dans les arts héraldiques, "au naturel" représente la couleur habituelle de l'objet représenté sur le blason. Cette couleur est apparue tardivement dans l'histoire des arts héraldiques.
Or : Dans les arts héraldiques, l'or est l'un des deux métaux correspondant au jaune.
Ouvert : Dans les arts héraldiques, une construction ou un bâtiment est ouvert lorsque sa porte est apparente.
Pal : Dans les arts héraldiques, bande verticale dont la largeur correspond à 2/5 de la largeur du blason et positionnée au centre de celui-ci.
Parti : Dans les arts héraldiques, "parti" représente la division de la totalité de l'écu en deux parties verticales d'aires égales.
Rouvre : Chêne.
Sable : Dans les arts héraldiques, le sable est une des couleurs correspondant au noir.
Senestre : Côté gauche de l'écu pour son porteur.
Sinople : Dans les arts héraldiques, le sinople est une des couleurs correspondant au vert.
Surcot : Vêtement du moyen-âge recouvrant la cotte de maille, littéralement "sur la cotte".
Taillé : Dans les arts héraldiques, lorsque l'écu est divisé en deux parties dans sa diagonale, du canton senestre du chef jusqu'au canton dextre de la pointe, on dit qu'il est taillé.
Tiercé : Dans les arts héraldiques, trois barres d'1/3 de la largeur du blason positionnées suivant la description. Par exemple : "tiercé en pal" exprime 3 barres de même largeur positionnées verticalement, "Tiercé en fasce" exprime 3 barres de même largeur positionnées horizontalement.
Timbre : Dans les arts héraldiques, éléments extérieurs situés au-dessus du blason.
Tranché : Dans les arts héraldiques, lorsque l'écu est divisé en deux parties dans sa diagonale, du canton dextre du chef jusqu'au canton senestre de la pointe, on dit qu'il est tranché.